« Je suis congolaise » (oui, vraiment!)

Article : « Je suis congolaise » (oui, vraiment!)
Crédit: Badara Preira
16 août 2021

« Je suis congolaise » (oui, vraiment!)

« Cause baby I am home… » – Julia Mouketo

Qui dit 15 Aout dit Congolais, Congolaise !

Avant tout, faut-il le dire, aussi particulier que ce jour soit pour le Congo, il l’est visiblement aussi pour chacun de ses ressortissants. Pour peu qu’il ne faille le rappeller, le 15 Août 1960 est la date à laquelle la République du Congo a accédé à sa dite indépendance vis-à-vis de ladite domination française en Afrique.

N’eut égard des polémiques liées au sujet, il n’en demeure pas moins que, cette date est la voix criante qui vient nous rappeler, sans nécessairement que l’on veuille l’entendre, notre identité territoriale première dans ce monde : « Je suis Congolais » « Je suis Congolaise ». Une expression qui relativement devrait traduire l’appartenance à une terre, à une culture, à une identité propre à un peuple peut-être ? En tout cas un composant de fierté qui nous le ferait répandre avec poids.

Pour ma part n’ayant pas toujours été le cas, j’ai appris à me poser (et reposer) cette même question … :

A quoi relies-tu le fait d’être congolais.e ?

… Et assurément à y répondre, difficilement je l’avoue… Pourquoi pas, à finir par la poser à d’autres, tel que maintenant ?

Ainsi, hier soir, j’ai de nouveau ouvert cette discussion et les retours semblaient être les mêmes : quelques peu « vides » et « douloureux du constat » selon un ami. Un autre me fera savoir, à l’issue de notre conversation entamée, que j’ai « remué le couteau dans la plaie ». C’est un sentiment que je comprends, certainement pas pour les mêmes raisons mais, n’empêche que je comprends.

En effet, pour ceux qui me côtoient, nombreux savent que je suis de ces personnes qui ont un accent quand elle parle lingala, de celles à qui ont dit « eh pardon ! pardon ! parle en français !! oyo lingala na accent moyen tè !! » (bref, que mon accent en lingala n’est pas fameux). Je nous épargnerai les commentaires pour le kituba… Ohlala ! (Rires)

Ces quelques faits ont valu, pendant longtemps, que quiconque se permettait de remettre en question la congolaise que je suis. Pour chacune des affirmations ou des actions identitaires que je faisais, dans certains milieux ca me valait une réaction inverse, le genre de propos qui semblait te retirer un droit … celui d’être congolaise.

« Se sentir étrangère chez soi, je l’ai bien ressentie… »

A bon vouloir lutter en vain, on finit par céder. Tel a été le cas de la petite fille que j’étais, j’ai le temps d’un instant abandonné. Et le temps d’une vie, j’ai perdu l’essence de mon identité. Si bien que, je ne me donnais plus le droit à la valeur du « Je suis congolaise », d’ailleurs il sonnait vide quand je le disais… aucune attache individuelle particulière si ce n’était par procuration familiale. Je me suis donc retractée et je suis retournée vers le monde que l’on m’offrait. Celui vers lequel certaines « locales » me jetaient en pâture…

Se sentir étrangère chez soi, je l’ai bien ressentie… Presque ce même regard porté aux compatriotes de la diaspora quand ils s’identifient.

Pourtant et en dépit de tout, j’ai tenu.

Moins que je ne le croyais, je suis restée là ; j’ai trouvé mon équilibre. Cet équilibre est venu à moi, je dirai. Nous l’avons construit, nous le construisons toujours.

La case de mon grand-père – Julia Mouketo

Paulo Coelho, dans l’Alchimiste, disait : « Je t’aime car tout l’univers a conspiré à me faire arriver jusqu’à toi » ; dans un premier temps, sur une collaboration inconsciente avec ma grande famille, il y est parvenu.

« … j’ai dû apprendre à observer, à comprendre mais surtout à assumer… »

Une certaine année particulièrement, je suis passée de celle dans la prestigieuse école parlant rarement de langues locales à celle qu’on envoya voir son arrière-grand-père paternel dans son village toutes les vacances… Soyez-en sure que j’ai pleuré la première semaine pour finir par m’approprier toutes les localités et tous les rouages par lesquels j’étais passée durant ces vacances.

Personnellement, il me les fallait. Je savoure encore les parades de danses traditionnelles, comment j’ai appris. Il y a aussi eut les expériences de pêche en pirogue, les champs avec mes tantes, les débats linguistiques avec mon arrière-grand-père & mes grand-mères, les trajets et même les mythes nocturnes des dessous de draps que l’on ne raconte pas à haute voix. (Rires)

Ça ne s’est heureusement pas arrêté là.

Car, dans l’éducation finalement tradi-moderne que j’ai reçue, j’ai dû apprendre à observer, à comprendre mais surtout à assumer.

Pointe-Noire a toujours été mon fief mais j’ai dû encrer plus profond mes racines alors j’ai observé : Ma grand-mère, mes parents, mes tantes et oncles qui ont eu un parcours similaire mais semblaient s’en sortir de manière brillante.

Tous ont un point commun : LA CULTURE, LES RACINES. La connaissance et la conscience de la culture propre (voire les) qu’ils ont reçus ; mais particulièrement l’estime qu’ils y ont porté. L’attache qui a été suscitée et demeure au-delà du lieu où ils se trouvent.

J’ai par ailleurs fini par me dire qu’il n’y avait pas, à vue d’œil, un profil type de l’identité congolaise … je n’en fais pas partie c’est certain. Quoique je n’en demeure pas moins congolaise. L’essence de ma personne, de mon être l’est. Ceci est indéniable.

La langue (et laquelle ?) est certes un vecteur notoire mais quelle place a-t-elle dans ce pseudo jugement si ceux qui l’imposent ne sauraient eux-mêmes remplir les vestiges de leurs cultures ? Ceci assurément afin d’assurer un héritage meilleur à ceux pour lesquels nous devenons gardiens aujourd’hui ?

Mon mot de la fin à cette question, hier, était tel quel :

« La conscience de l’héritage s’installe,

L’introspection à son tour nous demande qu’avons-nous finalement accumulé ?

Qu’avons-nous recueilli ?

Mieux, Au final,

Qui sommes-nous ?

D’où venons-nous ?

Et ça, malheureusement,

Peu le savent. Peu sont prêts. »

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Commentaires

Gloire Wanief
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Merci pour cet article

Santa Yvncia
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Le plaisir est mien.